mercredi 10 décembre 2008

Métissage : buzz et bug

Le métissage – Buzz et Bug ?

En 2007 sur un plateau télé de la campagne présidentielle, Julien Dray du PS déclarait avec vigueur et autorité : « il faut faire cette éducation du pays pour qu’il apprenne que désormais son avenir c’est le métissage… »

Le monde politico-intellectualo-médiatique français n’a donc pas attendu la victoire de Barack Obama pour faire la promotion du métissage. « La promotion » le terme est même parfois faible.
Quelle activité autour de ce mot. Il devient pratiquement un slogan, un label. En une élection les USA, en passant du débilissime ringardissime Bush au magnifissime métissime Obama, en une élection les USA retrouvaient la lumière et nous ringardisaient. Nous les Français avec notre petit Nicolas au « sang mêlé ».
Qui est in ? Le métisse (et la couleur aussi un peu quand même).
Qui est out ? Le blanc qui rejoint « La Blonde ».
Les titres et couvertures de magazines, les publicités, les articles de journaux, les commentaires politiques, jusqu’aux productions artistiques, tout les moyens sont utilisés pour valoriser le métissage. C’est devenu un argument commercial, reconnaît Vincent Cespedes lors d’une émission-débat « Demain tous métis ? » sur Arte. Même une candidate Miss France 2009 a cru voir là un argument de vente déclarant je cite « le métissage c’est la France nouvelle ».
Le métissage, forcément « moderne », face à la France trop blanche, forcément « moisie » d’Aurore Filipetti, serait le remède miracle à cette curieuse faculté des sociétés humaines à exclure (dans le meilleur des cas) pour mieux exister.

Si l’on y réfléchit un peu, cette promotion du métissage est un discours eugénique défendu par les mêmes qui tentent de faire de l’emploi du mot race un délit. Mais c’est pour la bonne cause, pour un « monde meilleur ».
Moi ça me met les neurones en émoi. Pas vous ?
Le sujet mériterait un essai complet et d’un meilleur serviteur. Je vais me contenter d’un modeste article en essayant de ne pas être trop réducteur et de rester pertinent.
Ce « buzz » sur le métissage va de paire avec les effets de la mondialisation, de notre déficit démographique suicidaire et des mouvements migratoires de masses qui s’y rattachent, je pense que cela est clair pour tout le monde.
Alors qu’au XXe siècle les nationalismes ont coupé court à la montée en puissance de l’internationalisme, cette fois-ci c’est promis on y arrivera. D’ailleurs Kapital et révolutionnaires rament dans le même sens, vers la mondialisation, c’est dire si l’on est confiant.
Pourtant nous sommes à un moment de l’histoire où des tensions apparaissent, où des tentations communautaristes surgissent, où des pouvoirs religieux montrent les dents. Certains ont osé évoquer des chocs de cultures, voire de civilisations. Rabats-joie. Stupide.
Alors les acteurs d’opinions sont appelés à trouver des voies et des voix qui nous permettrons d’échapper à la répétition d’une histoire violente pour «mieux vivre ensemble ».
Tout ça n’est pas nouveau. A chaque époque de « rencontres » il y a eu des réactions violentes et des recherches de moyens et discours plus ou moins contraignants pour maîtriser les tensions.

La république s’est construite sur ces contraintes.
Au début il y avait l’assimilation à l’intérieur et la mission à l’extérieur.
Décolonisation aidant la mission sera abandonnée et l’assimilation conservée.
Puis avec 68 et le relativisme nous sommes passés de l’assimilation, à l’intégration.
Puis avec l’anti-racisme on opta pour la diversité et le multiculturalisme.
Mais pour satisfaire notre éternelle quête d’universalisme et faire face au déclin de « l’occidentalité », alors que le discours sur la diversité n’a pas eu le temps de s’imposer, voilà l’ultime mise à jour, le Métissage… « Métissée» accolé à quelques mots, comme république, histoire, mémoire, culture, cuisine, musique, sans oublier France, « France métissée », ça peut même donner l’illusion d’un programme…marque déposée au PS et à gauche. Bon là au PS ils ont testé en interne la diversité, mais ils se sont aperçus qu’il pouvait y avoir des petites complications. Diversité, différences, divergences, oppositions, blocages, radicalisation, à hue et à dia ça tire. Maintenant ils vont métisser Hamon, Aubry et Royal…
Diantre que cela a été rapide ! Tellement rapide que les mêmes faiseurs d’opinions passent de l’un à l’autre (en chahutant parfois l’ordre chronologique ou en les mélangeant dans le même discours de célébration).
Diversité. Métissage. On pourrait penser à la technique du double effet. Un concept qui a fait ses preuves pour les rasoirs, les bonbons et tant d’autres produits.

Mais là, il y a un « bug ».
Le métissage, si les mots on un sens, c’est la fin de la diversité. C’est vive l’uniformisation ! Tous pareils, on ne se « foutra plus sur la gueule », croit pouvoir annoncer Pierre Perret dans sa chanson « Mélangez vous ». C’est vite pensé. Qu’est-ce que l’on peut dire comme âneries quand on est tenu de faire court et rapide. Comme Frédéric Taddeï, qui un soir s’enfonça face au même Pierre (décontenancé) en lui demandant pourquoi il n’avait pas été plus explicite dans son texte en appelant les femmes à ouvrir non seulement leurs bras aux étrangers mais aussi leurs cuisses… Taddéï insiste, le Pierre résiste en douceur, un peu gêné (faut le faire)… éclair dans l’œil de l’intellectuel-présentateur, la bouée elle est là ! « Vous ne pouvez pas sincèrement être pour le métissage et défendre la diversité culinaire… » (Je résume) et hop, on passe à autre chose.
Métissage. Diversité. Il y a un « bug » c’est sur. Comme une incompatibilité. Mais comme se sont les mêmes qui nous parlent (depuis 68), ils ne sont pas pressés de lever le doigt pour se signifier à eux-mêmes qu’il y a un problème et ainsi se décrédibiliser. (Ils ne le sont déjà plus vraiment, crédibles, ils le savent. Mais ne leur dites pas, ça les met de mauvaise humeur. Une humeur de Todd ou de Lévy mal interviewé.)

Je ne vous ferais pas ici le détail de mon cheminement, ni ne vous dirais pourquoi, mais moi j’ai choisi. Je prends la diversité. Elle est synonyme de liberté, si l’on y lie le respect. (Pas la crainte, mais le respect). Elle est la Civilisation même, comme le pense Lévi Strauss.
Le métissage, lui, ne vise rien d’autre que l’élimination définitive des races, pardon des phénotypes... Pas que des races, zut, des phénotypes d’ailleurs. La culture au sens le plus large est elle aussi appelée non seulement à « s’enrichir de l’autre » et plus si affinité… (Et même si pas affinité), pour s’effacer, muter sans résister dans le grand mélange mondialisé. Car là aussi d’un attachement trop fort à son identité, à sa culture, pourraient naître des tensions et des conflits.

Si l’on suit les « penseurs » du métissage, il faut enlever du dictionnaire, comme de la vue, les races (devenues phénotypes) pour éliminer les violences qu’elles engendrent. Le métissage serait La réponse. C’est rapide, comme un coït… (Coïterons nous encore dans quelques temps ?… on arrête pas le progrès). C’est vrai que ça évitera que d’autres veuillent les éliminer toutes sauf la leur, ou les asservir toutes… même la leur.
Mais si la justification de cet eugénisme est d’échapper à l’histoire violente, il va falloir aussi métisser les religions, les états nations, les systèmes politiques, pour devenir vraiment tous citoyens du monde, de Plougasnou à Simbawa, de Honningsvag à Puerto Toro … Sinon, nous aurons métissé partiellement, donc imparfaitement, laissant l’homme « nouveau » en butte à des sujets de « discordes » si pratiques pour les rassembler et pour mieux les faire s’affronter. Le laissant aussi bien démuni face à ceux qui n’auront pas suivi notre lumineuse évolution.
Plus ardu. Beaucoup plus ardu. Et long. Très long. En plus c’est sans garantie de résultat.

Donc il va falloir éliminer les différentes religions. Pour n’en garder qu’une seule ? Impossible. Je suggère donc d’opter pour l’interdiction… Traitement radical, sans rechute. Quoique.
Eliminer les frontières aussi. Les frontières sont sources de violences, mais ne se métissent pas.
Eliminer les différents systèmes politiques… un seul fera l’affaire. Sinon, conflit encore.
Il nous faut éliminer les solidarités autres que sociales (les seules qui vaillent en vue du plus parfait égalitarisme), isoler chaque plus petite entité, l’individu, tout en le rendant semblable de son voisin.

La porte ouverte à la dictature, à un totalitarisme mondialisé. Bien plus qu’une porte ouverte, sa justification. Pour un monde meilleur, Le Meilleur. Pouvoir, droit et légitimité mondialisés, unis pour 1000 ans…
Et puis oui tenez, si l’on élimine les races, les nations, les religions, parce qu’elles sont causes de violences, il faut éliminer toutes les causes de violences, la source même…. La première d’entre elle ? L’homme lui-même ? Pourquoi tant de haine ?
Dormez bien. Réfléchissez. Et comme dit André Bercoff « Réveillez-vous ».

Tribune libre publiée par Agoravox le 15/12/2008.

Tribune reprise sur
le site Cozop.com
le site Religion.123news.org
le site Wikio.fr
le site Collectif-passerelle
le site Dico du Net

2 commentaires:

  1. Bravo pour ce nouveau blog. Ce premier article semble prométeur. C'est bien écrit et pertinent.
    J'ai commencé le mien il y a cinq mois:
    http://europachristiana.blogspot.com/
    en parallèle avec le site de l'Ecclesia Christianitatis.
    Mon "angle d'attaque" est un peu particulier...
    J'attends avec impatience les articles suivants pour mieux cerner ta propre approche stratégique :-)
    Bon courage!

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  2. Merci pour vos encouragements.
    Ma production sera "humble et raisonnable" en tout... Qualité, quantité, contenu.
    Cet exercice permet aussi de mettre un peu les choses au clair pour soi-même.

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